vendredi 10 octobre 2014

escale en iran

En censurant un roman d'amour iranien
- Shahriar Mandanipour

Synopsis :

Téhéran, de nos jours. Comment un garçon et une fille peuvent-ils se rencontrer et vivre une histoire d’amour alors que la République islamique a instauré une rigoureuse séparation des sexes, aussi bien dans la rue et dans les jardins publics que dans les bibliothèques ? Sara et Dara s’aiment par messages codés inscrits dans des livres empruntés à la bibliothèque, par téléphone ou ordinateur interposé et au cours de promenades dans les rues en jouant à cache-cache avec les miliciens de la campagne contre la Corruption sociale.
Comment publier un roman d’amour, alors que l’impitoyable censeur pourchasse non seulement toute prétendue incitation à la contre-révolution mais également la moindre allusion érotique ? Au fait de toutes les théories littéraires, Shariar Mandanipour rédige sous nos yeux un poignant roman d’amour « postmoderne », à la fois réaliste et fantastique, placé sous l’égide des grands poètes persans, des écrivains et des cinéastes occidentaux.

Chronique :

Ecrire un roman d'amour en Iran, c'est presque mission impossible !



J'ai été un peu déçue en débutant ma lecture. Je m'attendais à lire un roman censuré. J'entends un roman barré de partout où j'aurais eu à deviner pourquoi tel moment ou telle chose ne pouvait pas passer le cap de la censure. Pas du tout.
Enfin, de temps à autre, l'auteur rature de lui-même des bouts de phrases, mais la plupart du temps, il nous explique comme il écrit son roman, son attachement à ses personnages et comment ceux-ci finissent par se libérer de son emprise pour tenter d'écrire eux-mêmes leur histoire car la censure iranienne que Shahriar Mandanipour essaie de leur imposer ne leur permet pas de vivre leur amour.

Le roman est en effet un documentaire sur la société actuelle iranienne, notamment la censure du Ministère de la Culture et de l'Orientation Islamique et le fameux M. Petrovich, impitoyable.
L'auteur nous parle du choix des prénoms et du Bureau de l'état civil, de la séparation des hommes et des femmes dans la société iranienne et des patrouilles de Campagne contre la corruption sociale et de la littérature et du cinéma en Iran, car ce sont les passions (réciproquement) de Sara et de Dara.



Au niveau des personnages, il y a nos deux protagonistes amoureux. Sara, une jeune étudiante en littérature classique iranienne (en effet on ne peut pas étudier la littérature contemporaine à l'université qui est trop imprégnée par l'Occident et est donc le mal personnifié), et Dara, un homme un peu plus âgé, qui a été étudiant en cinéma mais arrêté pour des causes politiques, il a tout perdu et travaille donc comme peintre en bâtiment.
Il y a leurs familles : celle de Sara est sans histoire, son père est fonctionnaire, sa mère femme au foyer, ils ne sont pas riches mais vivent bien. Et celle de Dara, qui a du mal à joindre les deux bouts depuis que le père a été lui aussi arrêté car il est communiste et que depuis la chute du communisme, il rumine dans son coin. La mère et Dara peinent à ramener de quoi manger.

Il y a aussi Sinbad, le prétendant fortuné de Sara. Et un voisin de Dara, un peu voyeur et complètement impliqué dans la répression de la corruption sociale. Pour animer un peu le récit et créer un triangle amoureux dont a besoin l'intrigue du roman d'amour.

Et puis surtout il y a l'auteur qui perd pied entre les remontrances de M. Petrovitch, le responsable de la censure littéraire, et ses personnages qui n'en font qu'à leur tête !
Ah, ce M. Petrovitch, c'est quelqu'un !
J'allais en oublier le vendeur ambulant de charmes et de potions magiques !



Bien que le roman n'était pas ce à quoi je m'attendais et que ça ne bondisse pas dans tous les sens, j'ai trouvé cette lecture très instructive. Shahriar Mandanipour parle avec humour d'un sujet sans doute très sensible pour lui : tout ce qui se passe mal dans son pays. Je connais extrêmement mal l'Iran et j'ai beaucoup appris sur la société iranienne depuis la chute de l'ancien régime du Shah.
De plus, l'auteur fait un clin d'oeil au film Cinema Paradiso :) si vous l'avez vu vous apprécierez, si vous ne l'avez pas vu, regardez-le et plus vite que ça !!!




Lu pour les challenges :

Destination : Iran

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